ETAT(S) DES LIEUX
CE QU'ILS EN DISENT
PHOTOGRAPHIES EXTRAITS SONORES EN RÉSIDENCE
PARCOURS DU SPECTATEUR
PHOTOGRAPHIES EXTRAITS SONORES EN REPRÉSENTATION
TEXTES
VIDEO 24'
CE QU'ILS EN DISENT
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La scène du théâtre est à l'échelle d'un quartier, l'action se situe entre imaginaire et réel, comédiens et habitants s'entremêlent : lorsque la compagnie de rue "Deuxième Groupe d'Intervention" s'installe, les frontières entre fiction et réalité se diluent. |
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(…) Tout a été mis en dehors avec 10 acteurs-habitants et 3 manipulateurs. Les spectateurs sont alors conviés à pénétrer dans ce quartier. Une intrusion étrangère, mais des habitants se dévoilent peu à peu : leurs histoires apparaissent au grand jour et le spectateur parcourt l’exposition, alors que les résidents du quartier participent, prêtant terrains, balcons… (...) Les habitants du quartier jouent le jeu et en deviennent acteurs. (…) ++ clic |
PHOTOGRAPHIES EXTRAITS SONORES EN RESIDENCE
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PARCOURS DU SPECTATEUR
Les murs et trottoirs accueillent les phrases poétiques du Jeune-Homme-Mobile…
Le linge bleu étendu dans la rue de la Femme-Epingle-à-Linge ouvre des perspectives…
La terre des parterres de fleurs, sous les mains curieuses de la Femme-Fleur, soulève des pans d’histoire via des objets symboles…
L’Homme-Grillage-Grillades concocte un grand feu…
Un filet d’eau rouge coule dans le caniveau…
Une fiction à l’échelle d’un quartier
Cette fiction fait converger les différentes histoires des Acteurs-Habitants vers un lieu commun à tous. L’Homme-Voiture-Rouge, l’Homme-Enfant-Poupées, la Femme-Fleurs, la Jeune-Fille-TV, la Femme-Chats… : associés à des objets démultipliés et porteurs d’un univers sonore, ils sont révélateurs d’une poésie sensible à travers leurs histoires singulières.
L’ensemble de ces éléments fabrique une vision différente du quartier… Les actions, les mots, les comportements des Acteurs-Habitants et les situations qu’ils proposent, conduisent à l’élaboration d’un paysage dans lequel chacun évolue.
Cette proposition questionne à la fois le fait de réaliser une pièce globale écrite pour l’extérieur et de l’inscrire dans la réalité vécue des personnes. L’enjeu est donc pour l’équipe de se glisser dans la réalité d’un quartier, d’être réceptive aux habitudes, aux modes de fonctionnement pour pouvoir mettre en oeuvre la proposition artistique. Un tissage de la matière du quartier et de celle apportée par l’équipe va construire la proposition finale. L’écriture globale repose sur la porosité, et le quartier choisi devient un véritable partenaire de la proposition.
Les deux temps
Tout d’abord un temps d’implantation, pour entrer en contact et en complicité directe avec les habitants, et un temps de représentation où sont invitées les personnes extérieures au quartier, mêlées aux habitants.
La porosité
Chaque quartier apporte sa couleur, son humeur, ses surprises et offre une configuration particulière au déroulement général final. La proposition « socle » est balisée : textes, jeu, musique et caractères des habitants fictionnels, puis s’imbrique et prend la couleur du quartier.
La composition générale de la proposition artistique donne aux spectateurs les clefs de circulation d’un Acteur-Habitant à l’autre, via des ruptures de conversations, des sons émis par les objets sonores, des temps suspendus, des actions surprenantes… Chacun voyage ainsi à son rythme dans la proposition au gré des séquences. Les Spectateurs-Déclencheurs voient s’exposer la vie intérieure des Acteurs-Habitants ; ils en sont la raison, le prétexte, « autres » symboliques qui permettent de donner corps à leur agitation intérieure.
PHOTOGAPHIES EXTRAITS SONORES EN REPRESENTATION
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TEXTES
La Femme-Chats
Elle va de station en station avec son caddie, la vieille, des petits coins qu’elle a aménagés pour les chats et elle distribue sa nourriture assidûment, ponctuellement, avec une volonté qui dépasse la sauvegarde d’une seule espèce. Elle nourrit large, les bêtes, son esprit, la mémoire, les autres. Ses nombreux protégés sont invisibles.
MinousMinousMinousMinousMinousMinousMinous…
Venez les chats, VenezVenezVenezVenezVenezVenezVenez…
Elle marche.
MinousMinousMinousMinousMinousMinousMinous…
Venez les chats, VenezVenezVenezVenezVenezVenezVenez…
Elle marche.
MinousMinousMinousMinousMinousMinousMinous…
Venez les chats, VenezVenezVenezVenezVenezVenezVenez…
Venez les chats, il est bon mon manger…
Elle marche.
MinousMinousMinousMinousMinousMinousMinous…
PatéePatéePatéePatéePatéePatéePatéePatée…
MangerMangerMangerMangerMangerMangerMangerManger…
Venez les chats, il est bon mon manger…
Elle marche.
MinousMinousMinousMinousMinousMinousMinous…
Venez les chats, VenezVenezVenezVenezVenezVenezVenez…
LeschatsLeschatsLeschatsLeschatsLeschatsLeschatsLeschats…
PatéePatéePatéePatéePatéePatéePatéePatée…
MangerMangerMangerMangerMangerMangerMangerManger…
Venez les chats, il est bon mon manger…
Il est bon il est bon il est bon…
Sardine ? Sangsue ?…Vous êtes là mes chats ?
Minous Minous MinousMinousMinous
VenezVenezVenezVenez…Pas peur pas peur…
C’est la mère Restaurant, manger manger manger…
Pas peur pas peur mes chéris
La mère Restaurant elle est là c’est la mère Restaurant
Au public.
Faut pas rester là, vous effrayez…
C’est pour les bêtes ici.
Pas pour les…
Viendront
pas si vous êtes là.
Mauvaise odeur, sentez le chien.
Faut partir.
Elle part.
MinouMinouMinouMinouMinouMinou…
Arrivez mes chéris, pas peur pas peur, c’est l’heure, c’est l’heure H.
Madame Restaurant elle vient par là vous gâter.
Maurice ? Roger ? Alice ?
Vous êtes là ?
Sortez mes amis, y’a du bon manger.
Aliiiice ? Elle part.
Canapé ? Autobus ?…Meschats meschats meschats
C’est la mère Restaurant, pas peur pas peur
Équilibré, bonne santé, beau poil
Où ils sont mes lions ?
Baby foot ? Salopette ? Hydravion ?
Des bons repas, équilibrés, bonne santé, beau poil, jamais malades, mieux
qu’au zoo.
Ici, liberté…
Différence.
Avec la mère Restaurant c’est liberté, beau poil, gouttière, respect…
La moitié y passe
Ça mange la moitié
Ma retraite
Qu’est-ce que je ferais avec ?
Rien.
C’est parfait.
Autobus ? Hydravion ? Baby foot ?
LamoitiéLamoitéLamoitiéLamoitiéLamoitié…
Au public.
Qui s’en occuperait si c’est pas moi ?
Madame Restaurant
Vous faites quelque chose pour ?
Non, vous faites rien. Vous regardez.
Le monde passe, vous regardez.
Alors madame Restaurant prend les choses en main, elle
nourrit les chats.
C’est un petit truc.
Je fais un petit truc parce que je suis une petite femme.
Si tout le monde faisait un petit truc, le monde serait un
grand truc.
Et toutes les petites femmes ferait un grand homme, H
majuscule.
Les petites mémés en bout de course ferait un H majuscule.
Part à un autre endroit
La Femme-Chats au détour d’un lieu où elle s’est posée, près d’une des
maison pour chats… Verse de la pâtée dans une assiette, en mange un peu
elle-même.
Pour elle et pour tout le monde.
Des fois, j’en mange.
Pourquoi j’en mangerais pas ?
C’est de la nourriture. De la bonne boîte. Avec le calcul de l’équilibre à l’intérieur.
C’est bon.
Les chats c’est propre.
La nourriture pour chats, c’est propre. C’est de la bonne boîte pour la moitié
de ma retraite par mois, rien à dire. C’est calculé.
Hygiène, santé, les petits trucs font les grands trucs.
Les chats, c’est beaucoup plus propre que le cul d’un banquier.
C’est plus propre que Miss Monde.
C’est plus propre que la lessive. On met des chats dans la lessive pour laver
mieux.
Pourquoi j’en mangerais pas ?
En mange.
Les vieux, faut bien les nourrir.
On les nourrit plus les vieux.
Y’a plus de place pour eux, on les met dans des endroits, comme des troupeaux,
ça meurt comme des mouches, on les nourrit pas,
les vieux ça sert plus, c’est de la chose, c’est de la lenteur, du poids mort, du
bétail, ça sert à emmerder le monde, ça fait chier, ça
sent mauvais, ça sort du cul des banquiers, y’a plus de place pour eux, évacuation,
tirez la chasse, adieu génération, les vieux
sont des étrons, on les nourrit pas, on en met dans la lessive, de la poudre de
vieux, pour faire peur à la saleté…
Elle marche.
La Jeune-Fille-TV
Là, c'est une autre femme qui parle, c'est elle et c'est une autre, elle est le symbole d'un genre. C'est ce qu'elle est devenu, ce qu'elle peut devenir, ce qu'elle a subi, ce qu'elle pourrait subir, plongée dans les dangers...
Trois heures du matin
Trois heures du matin. Quartier des Rosiers. Ciel couvert, température de saison. La maison est plongée dans le silence. J'ai dix ans. Je dors. Je dors mal. Depuis trois ans, je dors avec des couteaux sous les paupières qui me réveillent 26 fois par nuit. J'ai aussi un poignard qui bouge dans mon ventre. C'est douloureux et chaque matin je voudrais tuer et mourir. J'ai dix ans, ciel couvert, température de saison, la porte de ma chambre s'ouvre et se referme. Papa avance vers mon lit dans l'obscurité. Je pleure immédiatement, sans bruit, je suis obéissante, je n'ai pas la permission de pleurer bruyamment. Le grand froid tombe sur moi. Papa s'assied sur le bord de mon lit, il est en pyjama, il dit ne pleure pas ma petite fille mon amour, il caresse mon grand froid et il baisse les draps et il dit quand vas-tu grandir ma petite fille ma poupée, il caresse ma petite peau de glace, je vais te réchauffer dit papa, et il baisse mon petit pantalon et il met son doigt, il dit quand vas-tu grandir ma douce, ne fais pas de bruit, papa est gentil, et papa remue son doigt et ça tord mon poignard dans le ventre, si tu cries je te tue ma poupée, papa est gentil, il regarde comme tu grandis, il fait le docteur, tu seras ma belle dame ma poupée et papa remue son doigt et mon esprit disparaît.
Vingt-deux heures trente
Vingt-deux heures trente. Résidence des Jonquilles. Ciel clair, nuit froide, les enfants sont couchés, ma joue est brûlante, programmes de merde à la télé, je suis couchée sur le tapis, un tas déformé, je n'ai pas mal, demain j'aurai mal, demain je serai bleue, celui que j'aime est debout devant moi, il est furieux, parce que je ne veux pas, pas ce soir, celui que j'aime est ivre, il m'a envoyée au tapis, sa main est brûlante, ma tête a tourné sur mon cou avec un bruit métallique et mon sexe s'est verrouillé pour trois mois, maintenant celui que j'aime balance sa jambe vers l'arrière et son pied vient déchirer mon ventre, mes cuisses, mon ventre, mes seins, il cherche mes coins secrets, son pied me piétine, ciel clair, nuit froide, son pied est devenu fou, résidence des Jonquilles, les enfants sont couchés, demain école, je ne crie pas, je sais encaisser, je suis caissière au supermarché, j'encaisse sans bruit et sans devenir folle, celui que j'aime va se fatiguer, pas de résistance, ses colères c'est du papier, de nous deux c'est moi l'acier, l'acier demain matin sera bleu, je pleurerai plus tard dans l'année, celui que j'aime tombe dans le canapé, il pue l'alcool et le vinaigre de la méchanceté, mon corps brûlant est content, programmes de merde à la télé, tout s'est arrêté, la merde de l'écran me lèche les plaies, celui que j'aime s'endort la bouche ouverte, son pauvre pied douloureux, son coeur blessé, mon corps est un héros, demain je serai bleue, j'emmènerai les enfants à l'école en baissant le visage, je pleurerai l'année prochaine, plus tard, dans quelques années.
Six heures
Six heures. Soleil levant. Ciel froid. Trois nuages devant moi. Vent faible. Prévisions optimistes pour le week-end. Bison futé, journée noire. Septième étage, debout sur le rebord de la fenêtre, dans le ventre trois tubes de comprimés, dans le ventre un drapeau qui flotte, les oiseaux les plus petits passent devant moi en criant, je dis merci, merci quoi ? Dans la rue peu de bruit, les voitures de chaque côté du trottoir, je pleure sur mes pieds et ça éclabousse mes yeux, les oiseaux les plus gros appellent les pompiers, au loin une sirène, derrière moi tout le monde dort, mes pieds sur les toits qui bougent, dans la rue un homme sort, j'ai quinze ans et trois mois, debout sur le rebord de la fenêtre, habillée pour le lycée, dans mon ventre un drapeau claque et je m'envole, les oiseaux les plus petits entrent dans ma gorge, dans la rue l'homme crie, derrière moi tout le monde dort, ciel froid, soleil levant, chaussée luisante, mes ailes sont restées sur le lit, papa est allongée sur moi, est enfoncé dans moi, ne crie pas ou je te tue, tu es ma poupée sans bruit, ma petite fée, papa fait le docteur et tu aimes ça, ciel froid, odeur de glace, je voyage comme un bloc, le vent a peur de moi, dans la rue l'homme écarte les bras, mes ailes sont restées sur le lit, il y a un bruit inutile, je suis arrivée, chaussée luisante, habillée pour le lycée.
La Femme-Epingle-à-linge
Elle a étendu son linge dehors, dans la rue.
Elle prend quelqu’un à partie.
Tu as déjà étendu ?
Tu vas faire ça très bien. Je te montre.
Tu prends le linge, tu le défroisses…Tu le places sur le fil en respectant les coutures…Tu mets les épingles délicatement, mais fermement…Tu vois, c'est simple…C'est simple parce que ce sont les femmes qui ont tracé le chemin depuis des millénaires…Les mains des femmes sont simples et efficaces…Les mains des femmes sont pas des merdeuses...
Fais voir tes mains ? (les touche)
Elles sont belles tes mains.
Tu pends du linge pendant trois mille ans et tu auras des mains de femme. Courage !
« Linge bien pendu chasse la pluie », disait ma grand-mère.
Version du dimanche : « Linge bien pendu, ange suspendu ».
(à son aide) Vas-y, suspend les anges….
Elle retourne aux tas de linge, brasse, plonge dans l'eau…Prend une poignée de petites culottes, de soutien-gorge, les étend…
« Linge qui pend attire l'amant », disait ma tante Alice, clairvoyante.
Retourne au tas, extrait une veste à rayures, genre prisonnier, déporté…elle l'enfile lentement…Beaucoup trop grande pour elle…Temps…
« Linge qui pend, homme pendu », disait mon grand-père, revenu un peu étrange de la première mondiale.
Version du dimanche : « Pantalon au fil, bite au vent », le même, poète…
Elle s’étale de plus en plus, dans la rue.
La Femme-Fleur
Elle se dirige vers le parterre de fleurs situé en bas de chez elle. Elle profite de la présence des personnes qui la regarde, pour s’autoriser à y mettre les mains. Elle cherche dans la terre...
Il y a des petites particules, on trouve des choses, des petits bouts de machins…Ça empêche pas les fleurs de pousser, remarque, les racines ça danse. C'est comme un engrais spécial… (cherche des mains)… Tiens, regarde, un petit morceau de faïence…c'est joli… (cherche)… un morceau de verre…de miroir…tout rouillé… (se regarde) C'est marrant, on peut voir un tout petit morceau de son visage, on a le visage rouillé… Qui veut regarder son visage rouillé ?...
Vas-y , toi, cherche, mets tes mains là-dedans, c'est pas sale la terre, la nourriture pousse dedans et tu la mets dans ta bouche.
Vas-y fouille, fais-toi plaisir, j'ai de quoi essuyer, j'ai du chiffon pour les mains, va chercher tes racines, et si tu rencontres un ver de terre, embrasse-le car c'est sûrement un prince charmant ou une princesse endormie.
Tu es d'où, toi ?… Fouille dedans et tu vas retrouver ton pays natal. C'est ça la terre, c'est natal. C'est la mère. La terre, c'est la mère. C'est pas original mais c'est vrai…
Tiens, un caillou. Un caillou carré (le nettoie) Non, c'est pas un caillou, c'est un dé. Pas un dé à coudre, un dé pour jouer…
C'est curieux, non ?
Quelle genre de fleurs peut pousser sur un dé ?
Fleurs du hasard… (le renifle)
La main qui l'a jeté l'a jeté loin.
C'est ça la terre, tu jettes ton dé sur la table et il traverse le sol de ta maison et il fait des milliers de kilomètres avant de réapparaître…
L'Homme-Grillage-Grillades
Il écoute sa musique. Se sentant isolé et seul, il cherche a attirer l'attention sur lui…Il baisse le volume…
Dans le mariage on est seul.
Dans le divorce aussi, mais là on le sait.
Dans la vie, dans la mort, dans la rue, dans les champs, on est seul.
Réfléchis bien à ça.
Dans le sexe.
Dans le sexe.
Seul.
La fusion des corps construit l'aridité du monde.
Réfléchis bien à ça.
La jouissance est un mauvais calcul.
Un plus un égal moins dix.
Plus tu as de monde sur terre plus tu es seul en toi-même. Ça s'appelle les vases communicants. Ça monte d'un côté, ça descend de l'autre.
Baiser te divise par dix.
Avant de baiser tu rassembles toutes tes forces, tu es une espèce de monstre sanguinaire, un tas de protéines héroïques, après tu es un papier gras au bord d'une route, un sac plastique qui flotte au vent, un radeau…
Dans le rapport sexuel on est seul.
Dans la masturbation aussi, mais là on le sait.
Ma femme va bien merci
Elle fait dans la fusion des corps avec un autre. La solitude lui va bien.
Il paraît que je ne pense qu'à ça.
Bien sûr que je ne pense qu'à ça.
A la chose.
La quéquette.
Enfiler sa quéquette.
Nous les hommes, on a deux cerveaux et il y en a un qui est érectile.
Réfléchis bien à ça.
A l'origine, c'est pas deux silex qu'on a frotté pour faire du feu.
Tu vois ce que je veux dire ?
Cherche la rime.
Depuis l'origine, j'ai le froc qui se gondole à cause de l'invention du feu.
Se prend l'entrejambe dans les mains.
Ça cuisine là-dedans, ça cuisine.
Qui veut visiter les cuisines du château ? Gratuit !
Les femmes c'est différent, pas de quéquette, mais plein de cerveaux.
On a recensé une vingtaine de cerveaux chez la femme.
Enfin, chez la mienne.
Elle va bien merci.
Temps, remet de la musique. Un morceau style film romantique. Vaque à ses occupations, entre dans sa maison, peut-être…
L'Homme-Objets-Souvenirs
Au son de son poste vintage, il a étalé tous ses objets sur le sol, fatigué de les porter. Il a nettoyé le trottoir, installé des tissus, sorti des valises, les a vidées, des objets sont là, de provenance très diverses, des cartes postales, des photos, une voiture rouge, une poupée...et bien d'autres choses, tout ce qui concerne un vide-grenier concret et métaphorique... Il montre une photo comportant un bocal.
Dans ce bocal-ci, il y a le premier morceau de violon que j'ai joué à l'âge de sept ans. C'était très mauvais. On m'obligeait. Je détestais. Je pleurais. Je souffrais.
Qui veut un morceau de massacre conservé ? Il y a des murs lézardés à l'intérieur, des tympans violacés, des voisins ulcérés, des mers démontées...
Votre prix est le bon, c'est le vôtre, c'est le mien.
Qui me soulagera d'une enfance incomprise, d'une musique de drame, d'un naufrage ?
Prend un autre bocal de liquide indéterminé où flottent quelques particules indéterminées.
Dans celui-là, il y a le discours de François Mitterrand lors de son accession à la présidence de la république française, 1981. Un rêve authentique ! Si on observe bien, on peut voir encore flotter quelques espoirs sortant de la gorge socialiste...Tout n'est donc pas perdu...
Dans le même lot, j'ai ici les deux derniers silex avec lesquels l'homme moderne a produit du feu et des étincelles au mois de mai 1968 (deux pavés). L'homme était redevenu authentique, véritable, il avait retrouvé les gestes des origines, il combattait, le silex volait bas sur le monde, beau temps, espoirs, perspectives, joies, accouplements, natalités...
Qui veut me débarrasser du lot ?
Le bocal et les deux enclumes...
Votre prix est le mien, vous achetez vous jetez, vous aidez l'homme lourd à s'alléger.
Combien ?
Tu dis, tu emportes.
Tu emportes, tu jettes.
Tu jettes, tu aides l'homme lourd à s'alléger
Gratuit ?
Pourquoi gratuit ?
Si je te le donne, tu le jetteras mal parce que tu m'aimeras et il reviendra.
Si tu l'achètes, tu le jetteras très loin, parce que tu ne voudras pas de son poids dans ta propre existence.
D'accord ? On est d'accord ? Jeter loin ! Tout lâcher ! Combien ? Un euro ? C'est à toi. Tu vas le jeter. Je te dirai où. Je connais l'endroit, sous terre, là où l'on enterre, au cimetière des sous-marins... Merci, ami qui m'allège.
Amis, mes amis allégeurs, mes beaux éboueurs, mes beaux, mes éboueurs, amis de mes déchets, alors que dans le ciel de France on lançait des arguments de société (les pavés), un an plus tard de l'autre côté de l'Atlantique on lançait des hommes dans le ciel du monde...
J'ai ici, voyez authentique, ma propre empreinte de pied dans le plâtre au moment même où historiquement le premier sapiens sapiens posait le sien sur la lune le 21 juillet 1969...
Combien ?
Qui veut m'alléger d'un pas terrien ?
De la fuite éperdue de l'homme vers sa propre perte.
Partant dans l'espace, l'homme coupe ses racines, crétin, il coupe, c'est la fin des haricots, l'élastique va casser, les haricots sans racines, l'homme, grand crétin perdu, tout faux, ça part dans l'espace, ça se perd, ça galaxie, ça bordel...
Qui veut alléger l'homme lourd du poids de la racine coupée ?
Combien ?
L'empreinte de Pataugas !
Ton prix est le mien.
Tu dis tu emportes.
Tu emportes tu jettes.
Tu jettes tu es beau tu racines
Il ramasse ses objets, écoute son vintage, s’apprête à partir.
L'homme-Voiture-Rouge
Avec sa voiture il klaxonne pour que les spectateurs le laisse passer. Puis se pose. Regarde sa voiture, prend à témoin ceux qui sont là…en montrant les détails de son véhicule. Éteint la musique de style italien.
Huit couches de peinture croisées
Vernis antichoc
Pare-chocs tactiles
Ailes d'hirondelle
Montre les portes.
Phares à double parois étanches
Montre les phares.
Gouttières avec gargouilles intérieures
Bas de caisse en résine
Montre les bas de caisse.
Jantes autoclaves et antivol
Gomme antistress
Suspension NASA
Secoue la voiture, par l'arrière.
Direction assistée en croix
Fait le geste de la personne au volant.
Vitres à cuisson rapide
Haillon parachute
Capot isolant périmétrique
Sièges ergonomiques
Montre l'intérieur.
Revêtement cuir
Appuie-tête articulé
Habitacle panoramique
Tableau de bord éventail
Cendrier poétique
Levier au bain d'huile
Prise du volant stromboscopique
Appuie sur l'accélérateur, fait rugir.
Tu entends ?
Ça gamelle là-dessous !
Ça gamelle !
Yen a !
C'est pas du cassoulet en boîte.
Se place derrière la voiture, au sol, écoute le pot.
Tu entends la musique ?
Le chant ?
Karayan à l'intérieur.
Compte sur ses doigts, debout proche de la voiture.
Carbu déboîté
Courroie de distribution de vitamines
Échappement biseauté.
Chambre d'écho détartrée
Monte dans la voiture, fait rugir…
Tu entends ?
Va téter le pot.
La sortie des artistes.
Je te signe un autographe dans l'oreille !
Je te dépose une star dans l'écuelle !
Fait rugir, fait rugir...
Avance en klaxonnant
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