Créer "à même la ville"
À la manière des arpenteurs et des glaneurs, le processus de création d’Ema Drouin, autrice, scénographe et metteuse en scène, se déploie en mouvement, dans la rencontre avec un territoire, une situation, un sujet : explorer, sentir, écouter, regarder, dialoguer.
En pieds d’immeuble, dans un quartier en mutation, au coeur d’une cité péri-urbaine, derrière une cathédrale, en pleine nature ... quel que soit le lieu, Ema Drouin s’immerge, se rend poreuse, et écrit en allant vers ce, celles et ceux qui sont déjà là.
Cette méthodologie de création "à même la ville" nourrit une matière artistique dont l’essence est le décalage du point de vue, l’ouverture sur une réalité inhabituelle, le croisement avec l’inattendu…
En 2017, à Malakoff, en parallèle de ses créations et dans un contexte de forte transformations urbaines, elle ouvre son atelier de création sur la ville et ses habitant-es et crée L’Atelier de curiosité urbaine pour y proposer résidences, diffusion de créations, expositions, départ de parcours urbains, rencontres. Ce point de contact entre art et réalité devient lieu de croisement et d’expérimentations artistiques et scientifiques où l’on peut tout à la fois partager un café, participer à un séminaire, débattre, déposer ou prendre un objet, découvrir l’univers de la compagnie, proposer une action.
Ema Drouin écoute, accompagne, et ses oeuvres emmènent là où l'on ne s’attendait pas, où l'on n’était pas attendu. L’écriture de l’artiste se fait gestes et matérialisation concrète de son intention artistique "d’aller vers".
C’est peut-être là un sens concret du mot "engagée".
De l’intime au politique
The personal is political* scandaient les féministes dans les années 60. Portée par cet héritage, Ema Drouin, avec Deuxième groupe d’intervention, fait entendre au dehors des paroles venues du dedans, des voix peu ou pas entendues.
Ces existences parallèles, à la fois proches et étrangères, viennent toucher les spectateurs-trices et les passant-es, sans tabou ni brutalité. Jouant avec le décalage et le jeu entre réalité et fiction, elle brouille les pistes pour mieux révéler et créer la rencontre dans l'espace public au coeur de ses préoccupations.
L’homme dans sa maison de carton nous invite à prendre le thé.
Un théâtre antique se dresse sur la place pour raconter la tragédie du réel. Les objets racontent des histoires de vie. À quelle université appartient donc ce groupe de chercheur-euses qui escaladent un muret ? Regardez le ciel ! On y voit un jeune homme qui se lance du toit d’un l’immeuble. Va-t-il s’envoler ?
Traversée par les bouleversements de la société, sensible aux mouvements des plaques urbaines qui glissent au fil des politiques publiques, Ema Drouin met son art au service d’une utopie humaniste.
*Le privé est politique.
Itinéraire
"J’ai ouvert la porte, je suis sortie, j’avais 18 ans, j’ai pris le risque."
Formation au trapèze avec la famille Moralles.
1987 : création, avec Philippe Freslon, de la Compagnie Off à Tours. Elle y aborde l’écriture, la conduite des spectacles et des interventions, la direction d’acteur-trices. Trapèziste et actrice, elle interprète les images décalées du répertoire de la compagnie.
Elle est diplômée de l’école nationale du cirque au Carré - Sylvia Montfort, suit les cours de trapèze volant de Jean Palacy à Noisiel. Elle se forme aux techniques du clown avec Philippe Gaulier, du comédien-ne avec Sigmunt Molik, Tarak Hamman (méthode Grotowski) et d’Alexandre del Peruggia.(Regard et mouvement). À cette période elle joue régulièrement avec la Ligue d’Improvisation de Touraine.
1995 : création de Deuxième Groupe d’Intervention avec Jérome Plaza et Renaud Grémillon et installation une dizaine d'années avec le collectif artistique Les Mêmes, dans l’ancienne Blanchisserie du groupe hospitalier Charles-Foix à Ivry-sur-Seine. Elle dirige depuis toutes les créations de Deuxième Groupe.
2000-2002 Rôle titre dans La maman du prince d'Eric Durnez, mes Thierry Lefebvre, UneCie, Bruxelles
Entre 2000 et 2005, elle créé : Panoplie-Catalogue, Le Groupe de recherche es poétic puis Paroles de murs, texte Claudine Galéa et Etat(s) des lieux texte Jean Cagnard.
2005-2007 : Pilotage, avec Françoise Vuillaume (alors co-directrice de la Chartreuse-Centre national des écritures du spectacle), du groupe "Écrire pour la rue" dans le cadre du Temps des Arts de la Rue mis en place par le ministère de la Culture
De 2006 à 2008 : présidente de la Fédération des Arts de la Rue en Île-de-France. Elle est membre du groupe Mais que font les artistes ? qui rassemble Anne Gonon, Michel Risse, Marie-Do Fréval, Mark Etc...
Fin 2007 : Deuxième Groupe d’Intervention s’installe à Malakoff où elle approfondit son travail d'écriture notamment en signant les textes de ses pièces, tout en prenant à bras le corps la question de l'implication artistique dans la ville (rapport aux paysages, cartographie sensible, explorations urbaines...) 2010 Tragedie... Un poème ; 2012 On écrit sur tout ce qui bouge ! 2014 À quoi rêve Peter ? 2015 Le garçon qui veillait 2016 D'ici on voit la tour Eiffel#1
2017 : Ouverture de l'atelier de curiosité urbaine à Malakoff
2018 Vies parallèles 2019 C'est ma nature 2020 Opus pour trois villes
Entre 2020 et 2023 Elle pilote l'Atelier de curiosité urbaine l'Escale- EVS-Espace de Vie Sociale dans le 13ème arrondissement de Paris.
Interventions régulières lors de sessions de formation, de groupe de travail, de réflexion, lors de séminaires et/ou de commissions d'attibution ( FAIAR, l'Atelier 231, le Studio Asnières, Jouer dans l'espace public, un art d'acteur créateur, Agiter avant Emploi-L'Ateline, Groupe de travail DRAC-IDF, Groupe art de la rue Artcena, ENS-Pauline Guinard, Condition Publique, Fondation Beaumarchais, SACD-DGCA...)
Sociétaire de la coopérative de rue et de cirque - Paris
Sociétaire de la SACD et membre de la Maison des artistes